Dans les brochures de saison, beaucoup d’éditos commencent par un constat sur l’état du monde qui serait dans un bouleversement exceptionnel. Sauf que le monde et la société évoluent sans cesse et que ces évolutions, aussi déstabilisantes soientelles, prennent des formes toujours différentes : la technologie, les rapports internationaux, le genre, les libertés individuelles, l’écologie… Bientôt, le regard que porteront les générations à venir sur les années 2020 sera le regard que nous avons devant des photos aux couleurs sépia.

Cela force l’humilité mais aussi la responsabilité. À notre niveau, comment influer sur ces mouvements en tentant de les accompagner, de les soutenir, surtout quand ils résistent à des mouvements contraires, réactionnaires. C’est ce que le Manège et son équipe tentent de faire, en accompagnant dans leurs questionnements les équipes artistiques et les usagers de la scène nationale.

Tout d’abord, il est dans nos missions, et aussi ancré dans l’ADN de notre maison, de soutenir les artistes et la liberté dans leurs créations. Le choix de ce soutien porte sur le parcours des artistes mais aussi sur la singularité de la forme ou du propos, les valeurs portées par ce travail et le lien avec la ligne artistique du Manège. Nous découvrirons avec vous durant cette saison une quinzaine de pièces que nous avons accompagnées et coproduites, en favorisant les grands formats en danse, cirque, cabaret et marionnette, que nous permettent les plateaux du Manège mais aussi des formes plus singulières, notamment à l’occasion de notre festival Born to be a live.

La question de la diversité se pose aussi sur la diversité des territoires. Comment faire territoire national quand il s’agit de penser à l’accompagnement et la circulation des oeuvres du spectacle vivant issues des départements d’outre-mer ? Certains d’entre eux, et je pense particulièrement à Mayotte, sont dans des difficultés majeures, avec des structurations insuffisantes, et d’autres font l’objet d’a priori et d’incompréhensions qui nécessitent d’entretenir le dialogue avec la métropole. Cette saison nous aurons donc la chance d’accueillir des projets de Guadeloupe, de la Réunion et de Mayotte avec notamment le jeune chorégraphe comorien installé à Mayotte, Lil’C, qui sera artiste compagnon du Manège.

Enfin, la convivialité et l’irrévérence restent un moyen important de se regrouper joyeusement tout en portant des messages de liberté, d’ouverture et de diversité. Entre les cabarets de création et les soirées accompagnées de DJsets, ce sera l’occasion chaque mois de passer ensemble des moments de partage.

Une saison aux questionnements sensibles et nécessaires, dans un esprit de convivialité et de bienveillance.

Bruno Lobé
Directeur