All the fun se présente comme « la tentative de chorégraphie d’une rave party avec le jonglage pour seule substance psychotrope ». D’emblée le ton est donné. Les jongleurs de la compagnie Ea Eo cultivent un art avéré de l’absurde, propre à faire jaillir des étincelles. Mais on aurait pu s’en douter… Parce que pour affirmer que « les chutes déterminent à peu près où s’arrête la vie et où commence la mort », ou encore que « jongler rallonge l’espérance de vie et rend les animaux super-sympas », il faut un certain grain de folie.

Au son d’une musique électronique allant progressivement de 90 à 170 BPM, sous un plafond d’ampoules en fin de vie faisant office de stroboscopes artisanaux, les cinq interprètes survoltés transforment tout ce qui leur passe sous la main en objets de jonglage : massues ou balles coloriées à la main, micro, ou même corps d’un comparse.

Dans ce maelstrom tournoyant, les prouesses techniques deviennent prétexte à des interrogations existentielles. Logique dans un monde soumis aux lois précaires de la gravité et toujours menacé d’effondrement où lancers vertigineux, équilibres improbables, trajectoires, chutes, prennent une évidente portée métaphorique. Entre hommage pétillant et parodie décalée, All the fun renouvelle joyeusement la pratique jonglistique dans une folle partition de groupe.